Nous sommes donc bien arrivés à Yangon, anciennement Rangoon, ex-capitale de l'ex-Birmanie (aujourd'hui Myanmar). En fait, le gouvernement militaire a décidé de revenir au nom qu'avaient les villes avant la colonisation britannique, ce qui explique pourquoi en 1989 beaucoup de villes ont changé d'appellation.
De plus, en 2005, la capitale étant jugée trop proche de la frontière Thaïlandaise, le choix a été fait de construire une ville de toute pièce au centre du pays et au coeur de la jungle, Naypyidaw ("demeure des rois") et d'en faire la nouvelle capitale.
Nous nous sommes longtemps demandés si nous voulions visiter ce pays. Tous les voyageurs rencontrés en sont revenus enthousiastes et il ne semble comporter aucun risque pour les touristes dans les "régions autorisées".
Cependant, on ne peut pas dire que le régime soit particulièrement ouvert et, même si les couleurs du drapeau sont rastas (vert, jaune, rouge), les dirigeants sont loin d'être de sympathiques reggae men. La devise du pays est : "Le bonheur se trouve dans une vie harmonieusement disciplinée", ça laisse perplexe. Et, bien que le régime soit depuis 2011 une "république", elle n'a pas grand chose de démocratique. Le pays s'ouvre un peu depuis cette date mais l'opposition politique et les minorités sont toujours largement réprimées.
Nous sommes bien conscients que venir ici, c'est donner de l'argent à l'ancienne junte militaire par les taxes prélevées auprès de l'aéroport, des hôtels, des billets d'entrée sur les sites... Mais c'est aussi donner un peu d'argent à la population et peut-être que l'entrée toujours plus grande de touristes au Myanmar conduira le pays à persister dans la voie de l'ouverture et de la démocratie.
Il fait nuit quand notre avion atterrit, nous prenons un taxi pour nous rendre à notre guesthouse située dans le centre, à une grosse demi-heure de l'aéroport. Notre première surprise est que le volant des voitures est situé à droite (comme en Thaïlande) mais que la conduite se fait elle aussi à droite (comme chez nous). Jusqu'en 1974, du fait de l'héritage colonial britannique, les Birmans roulaient à gauche jusqu'à ce que l'astrologue du général Ne Win informe ce dernier que la droite lui serait plus favorable. Du coup, à partir de cette date, tout le monde roule à droite. Néanmoins, ils continuent à s'approvisionner majoritairement auprès du Japon pour leurs véhicules, d'où le fait que le volant à droite persiste.
La guesthouse est une maison assez étroite mais sur 10 étages, le dernier étant une toute petite terrasse avec une jolie vue sur la ville. Nous sommes au 8e et monter les sacs dans les petits escaliers par cette chaleur est un peu une épreuve. Nous déposons nos affaires dans notre petite chambre, le tarif semble un peu élevé par rapport au standing mais comparé à ses voisins, le Myanmar est une destination relativement chère pour le logement. Cela s'explique sûrement par le fait que les hôtels les moins chers ne sont pas autorisés par le gouvernement à recevoir des touristes.
Nous allons ensuite trouver à manger car il est déjà 22h. Il y a un petit décalage horaire avec la Thaïlande, une demi-heure de moins.
Le gérant de l'hôtel nous explique qu'il faut que l'on soit rentrés avant 23h car après, les portes seront fermées et nous ne pourrons plus rentrer... Après avoir un peu déambulé dans des rues étonnamment calmes, nous trouvons notre bonheur parmi les étales de fruits. Les trottoirs sont défoncés, des ordures sont répandues un peu partout sur la chaussée, les faciès des gens sont très variés allant des traits chinois aux visages indiens, pas de doute possible, nous ne sommes plus en Thaïlande.
L'hôtel est situé près du quartier hindou (l'Inde et le Bengladesh ne sont qu'à quelques centaines de kilomètres) mais l'on croise également des gens avec le petit chapeau musulman, une église et une synagogue sont toutes proches, un mélange impressionnant même si l'immense majorité de la population (90 %) est bouddhiste. Le Myanmar compte parmi ses 55 millions d'habitants plus de 100 ethnies et autant de langues.
Un chant de prière (sûrement bouddhiste) retentit à côté de la guesthouse durant toute la nuit mais nous sommes tellement crevés que cela ne nous empêche pas de dormir !
Le lendemain matin, après un très copieux petit déjeuner à l'hôtel, nous marchons jusqu'à la pagode Sule située toute proche. Son stupa d'une cinquantaine de mètres de haut est très ancien mais elle est aujourd'hui située sur un rond point et entourée de boutiques d'astrologues.
L'astrologie et l'irrationnel joue un grand rôle en Birmanie. Le jour de naissance conditionne la vie des gens. A chaque jour est associé un astre, un animal et un chiffre : Le lundi est le jour de la Lune, du tigre et du chiffre 2 ; le mardi de Mars, du lion et du chiffre 3 ; le mercredi matin de Mercure, de l'éléphant avec défenses et du chiffre 4 ; le mercredi soir de la planète Rahu (imaginaire), de l'éléphant sans défense et du chiffre 8...
A l'aide du chiffre de naissance, des lignes de la main et de leurs livres "savants", les astrologues peuvent prédire l'avenir et "informer" sur les choses à éviter. Par exemple, quelqu'un né le lundi ne peut pas épouser quelqu'un du vendredi (cela paraît logique non ?). Les astrologues et la numérologie sont pris très au sérieux par les dirigeants birmans. Par exemple, la terrible répression militaire qui tua plus de 3 000 manifestants et grévistes débuta le 8 août (8e mois) 1988 à 8h08. Le 8 est un chiffre porte-bonheur pour la junte, un peu moins pour la "révolution de safran" qui tourna court.
Par ailleurs, le nom de famille est donné en fonction du jour de naissance et n'a aucun rapport avec le nom des parents. Pour éviter qu'il y ait trop d'homonyme, on y ajoute parfois le numéro de sa carte d'identité...
Le joli parc Maha Bandoola que nous traversons fait face à la mairie, un grand bâtiment un peu mégalo. Nous longeons ensuite les docks sur la rivière Yangon jusqu'à une nouvelle pagode, Botataung.
La légende raconte qu'il y a plus de 2 500 ans, deux frères offrirent des gâteaux au miel à Bouddha qui sortait d'une période de jeûne. Pour les remercier, il leur offrit 8 de ses cheveux. Un des cheveux serait resté sur ce lieu, entraînant la construction de la pagode.
La grande particularité de l'endroit est son stupa principal qui est creux.
On peux donc y entrer et déambuler dans un dédale couvert de panneaux dorés. C'est ici que le cheveu de Bouddha est exposé, au milieu d'une grande pièce dorée inaccessible mais dans laquelle les gens glissent des billets à travers la vitre. On sent que l'endroit est très important pour les croyants.
On peux donc y entrer et déambuler dans un dédale couvert de panneaux dorés. C'est ici que le cheveu de Bouddha est exposé, au milieu d'une grande pièce dorée inaccessible mais dans laquelle les gens glissent des billets à travers la vitre. On sent que l'endroit est très important pour les croyants.
En sortant du stupa sur la droite, nous empruntons une passerelle au dessus d'un bassin asséché car en train d'être nettoyé. Les nombreuses tortues pataugent dans le fond d'eau boueuse qui reste.
Au bout de la passerelle se tient 3 nats. Les nats sont une spécificité du bouddhisme birman. Il s'agit d'esprits qui sont classés en deux catégories : les nats supérieurs sont ceux des rois, des nobles, des moines morts subitement et n'ayant pas pu préparer leur réincarnation tandis que les nats inférieurs sont les esprits des terres, des forêts, des sources... Pour sédentariser ces esprits, il convient de construire de petits sanctuaires. Ici, il y a le nat de la pluie, le nat qui exauce les voeux et un autre que l'on ne connaît pas.
Au bout de la passerelle se tient 3 nats. Les nats sont une spécificité du bouddhisme birman. Il s'agit d'esprits qui sont classés en deux catégories : les nats supérieurs sont ceux des rois, des nobles, des moines morts subitement et n'ayant pas pu préparer leur réincarnation tandis que les nats inférieurs sont les esprits des terres, des forêts, des sources... Pour sédentariser ces esprits, il convient de construire de petits sanctuaires. Ici, il y a le nat de la pluie, le nat qui exauce les voeux et un autre que l'on ne connaît pas.
Pour la suite, direction LE monument de la ville, la pagode Shew Dagon située sur une petite colline. On essaye de s'y rendre en bus mais une dame nous explique que c'est compliqué. Du coup, elle arrête un taxi et négocie le tarif pour nous ! C'est la première fois que cela nous arrive et l'on trouve cela adorable. Dans l'ensemble, les gens sont charmants, certains nous saluent avec des grands sourires dans la rue, c'est très agréable.
Le trajet est long car la circulation est assez infernale, il y a beaucoup de voitures et, étonnamment, aucun deux roues, qui sont interdits dans Yangon. Notre taxi nous dépose finalement devant l'entrée est.
Deux grandes statues de lions encadrent une série d'immenses escaliers couverts bordés de boutiques et qui nous permettent de grimper jusqu'au niveau du temple.
La première chose qui nous frappe est cet immense stupa central abritant les 7 cheveux de Bouddha rapportés par les deux frères il y a 2 500 ans. On a du mal à imaginer ce qu'ils auraient construit s'ils avaient eu une mèche entière... La forme actuelle de la pagode est beaucoup plus récente et date du milieu du XVIIIe siècle.
Le monument central est visible depuis toute la ville, il mesure 98 mètres de haut, son diamètre à la base est de 43 mètres et le bulbe est recouvert de plus de 700 kg d'or... Une grande partie est en réfection mais il n'en reste pas moins impressionnant, le plus grand du monde parait-il. Il est entouré de 64 pagodons parmi lesquels on en retrouve 8 correspondant aux jours de la semaine bouddhique. Les gens viennent arroser le Bouddha qui correspond au jour de leur naissance.
Au sommet du stupa se trouve l'ombrelle du roi Mindon, mesurant 10 mètres de haut, elle est entourée de 1 400 clochettes d'or et d'argent. Tout en haut se trouve la girouette incrustée de 6 500 pierres précieuses.
Devant cette opulence de richesse, on en oublierait presque que le Myanmar est un des pays les plus pauvres au monde.
A chaque point cardinal de la pagode se trouve un temple en l'honneur d'un Bouddha. On va vous épargner la description détaillée de tout le monument, c'est immense, superbe, envoûtant. Il règne ici une atmosphère très agréable, nous sommes dimanche et des familles viennent pique-niquer dans les temples, des femmes se rassemblent pour prier, des jeunes viennent discuter, des équipes de croyants viennent nettoyer le sol...
C'est très animé et ce n'est pas uniquement un lieu de recueillement, c'est un véritable lieu de vie, le centre religieux mais aussi social et politique du pays. C'est ici que débutèrent les grands mouvements de protestation contre le pouvoir en 1988 et en 2007.
C'est très animé et ce n'est pas uniquement un lieu de recueillement, c'est un véritable lieu de vie, le centre religieux mais aussi social et politique du pays. C'est ici que débutèrent les grands mouvements de protestation contre le pouvoir en 1988 et en 2007.
Nous passons l'après-midi entière dans ce lieu magique à déambuler au milieu de cloches multi-centenaires, d'une empreinte de Bouddha, d'arbres gigantesques, de Bouddhas couchés, debouts, assis, allongés... Rien que pour ce monument, Yangon vaut le coup d'être visitée.
Pour le dîner, nous choisissons une adresse indiquée dans le guide et qui propose de la cuisine locale. Il y a le choix entre différents curry, boeuf pour Elise et poulet pour Sylvain. Il est accompagné de riz, d'un bouillon de poisson et de quelques légumes. Au goût, cela n'est pas mauvais, seulement, il y a très peu de viande et beaucoup de gras. Pour la nourriture aussi, on sent que l'on n'est plus en Thaïlande. Sur l'addition, il y a deux petites vignettes qui correspondent à la taxe prélevée par le gouvernement.
Au petit déjeuner, nous sympathisons avec des Français qui terminent leur voyage de 4 mois avec leur fille de 11 ans, ils ont adoré leur passage au Myanmar.
Dans la rue, nous croisons de nombreuses bonzesses habillées en rose et orange, certaines sont très jeunes. Elles portent un grand bol en bandoulière et se mettent à chanter devant les étals afin de recueillir des offrandes.
Un peu plus tard dans la matinée, nous arrivons à prendre un bus local et il va même là où nous voulons ! Ce n'est pas évident car l'alphabet est très différent du nôtre, tout comme les chiffres... Il contient beaucoup de lettres tout en rondeur. Donc pour notre part, nous voyons beaucoup de petits ronds, alors qu'en Thaïlande se sont plutôt des petits ponts, des "n" arrondis. Alors on essaye de faire des associations d'images avec les caractères que l'on voit. Du coup nous prenons le bus papillon !
Nous descendons à proximité du lac de Kandawgyi bordé par un joli parc... payant. La promenade sur une succession de passerelles en bois (parfois mal en point) est agréable. Le lac de couleur vert fluo est parsemé de jolies fontaines et offre un beau point de vue sur Shew Dagon. Plus loin, c'est Karaweik qui apparaît sur le lac. C'est une immense pagode bateau en béton ornée de deux gigantesques têtes de canards. Cela a été construit par le régime et un restaurant se trouve au niveau du pont principal (aussi cher que médiocre d'après le guide).
Après un repas meilleur que la veille, il est déjà temps de retourner à l'hôtel pour prendre le taxi qui, 1h30 de bouchons plus tard, nous dépose à la gare routière. Nous voyageons avec Alain et Martine, un sympathique couple de Français à la retraite.
Nous prenons un bus cette nuit pour Bagan, une ville au nord de Yangon.
En arrivant devant le bus, on pense s'être trompés car c'est un bus classique, sans couchette, ni toilettes, ni confort mais non, c'est bien notre bus dans lequel il va falloir, tant bien que mal, dormir ! La nuit de sommeil est courte mais la route est bonne, le bus conduit prudemment et nous arrivons finalement à Bagan à 3h du matin !
En arrivant devant le bus, on pense s'être trompés car c'est un bus classique, sans couchette, ni toilettes, ni confort mais non, c'est bien notre bus dans lequel il va falloir, tant bien que mal, dormir ! La nuit de sommeil est courte mais la route est bonne, le bus conduit prudemment et nous arrivons finalement à Bagan à 3h du matin !
Ouah, les merveilles reviennent, le manque se faisait cruel !! Merci pour toutes ces infos passionnantes, pour l'humour et les photos grandioses, touchantes ou drôles. Que d'or !
RépondreSupprimerLe bus n'a pas de couchettes mais de jolis rideaux à pompons!
des bisous à vous 2.
Annie
Tout à fait d'accord avec Annie : je vous cherchais quotidiennement....! encore merci pour ce voyage ... le balayage collectif que nous observons sur vos photos a t il une signification ?
RépondreSupprimerMarie Hélène
Hello !
RépondreSupprimerRavies de voir que vous avez apprécié Yangoon malgré tous les commentaires négatifs qu'on vous avait donnés sur la ville ! On avait fini par la capitale après un mois dans le pays, ceci explique peut-être cela ! ^^ En tout cas vous avez l'air de vous éclatez c'est chouette ! Bisous