Huaraz et Chavin

Nous arrivons dans la petite ville de Huaraz à l'aube, le soleil se lève sur les montagnes enneigées au loin, la journée commence bien ! Cette bourgade nichée à 3 000 mètres est parfois appelée le "Chamonix péruvien" car c'est le départ de très nombreux treks, randonnées et ascensions dans la Cordillère Blanche qui compte 22 sommets de plus de 6 000 mètres ! 

La trilogie des Andes : Ane, poule, cochon (avec cactus en prime !)

Après le petit déjeuner, nous montons dans un bus (et oui, on en aura testé pas mal des bus !) pour rejoindre Chavin de Huantar, localité au sud-est de Huaraz, à environ 3h de route. Le paysage de montagne nous régale, c'est assez vert, il y a plein de ruisseaux, de superbes lacs et des beaux sommets.

La place principale est très jolie avec sa belle fontaine, ses bougainvilliers en fleur, sa jolie église et la vue dégagée sur les montagnes.

Après avoir posé nos sacs à dos dans notre premier hôtel ** locales (on ne se refuse rien !), nous allons visiter le musée. 

Vue de notre chambre

Si la fondation du musée date de plus de 80 ans, un co-financement avec le gouvernement japonais a permis de le rénover et de renforcer le bâtiment afin qu'il puisse résister aux séismes, assez fréquents dans la région. L'entrée est libre et le musée propose de très jolies stèles, des conches (coquillages) et des "têtes tenons" en pierre ("cabezas clavas"), tout ceci retrouvé sur le site archéologique de Chavin. Le clou de la visite est sans conteste l'obélisque de Tello qui a réintégré le musée en 2009 (il était à Lima). Taillé dans un bloc de pierre de 2,50 mètres de haut, il est très sculpté et représente toute la cosmogonie de la culture Chavin. Une autre merveille retrouvée sur le site de Chavin est la Stela Raimondi qui servit pendant longtemps de table a un habitant de Chavin qui l'avait trouvé dans son champ avant d'être découverte par le Raimondi en question, un explorateur italien. Cette stèle est aujourd'hui à Lima mais devrait réintégrer le musée de Chavin cette année. 

Réplique de la Stèle Raimondi expliquée par notre guide

Après cette visite, nous faisons un petit tour aux bains. En effet, des eaux chaudes thermales sont utilisées pour remplir de grandes baignoires ! La sensation de détente est très agréable, par contre l'odeur de soufre qui reste sur la peau l'est un peu moins.. 

Le lendemain matin, nous visitons le site archéologique de Chavin, découvert par l'anglais Tello en 1919 et qui mena 3 campagnes de fouilles successives jusqu'en 1940. La civilisation Chavin est une des plus anciennes du Pérou, entre 1 000 et 300 avant JC. Situé dans une zone sismique mais également à la confluence de deux rios et donc exposé aux inondations, le site n'en est pas moins toujours debout. Seul 30 % des vestiges sont découverts, le reste a été enseveli lors d'un glissement de terrain en 1945 et reste du coup préservé. 

Un important système de drainage a été construit sous le site avec tout un réseau de galeries pour canaliser l'eau et éviter l'engorgement.

Canal de drainage

L'intégralité du lieu a été construit avec une très légère pente pour mieux résister aux séismes. De plus, dans les murs les plus hauts, des petites pierres sont intercalées entre les gros blocs afin de donner de la mobilité à l'ensemble pour faire face aux tremblements de terre. Les Chavins avaient pensé a tout !

Ingénieux système de construction Chavin

Nous prenons un guide afin de mieux comprendre ce que nous voyons, celui-ci est très clair et très cultivé et nous apprenons plein de choses ! Le lieu a été un centre cérémoniel majeur et également un centre d'instruction (astronomie, agriculture). 

Le premier arrêt se fait sur la place centrale. Celle-ci, carrée fait 49 m de coté (7²). Ce chiffre n'est pas choisit au hasard car le nombre 7 est sacré pour les Chavins, nous le retrouverons durant toute la visite. La place servait à accueillir les gens lors des cérémonies, elle est parfaitement orientée avec un bel escalier à chaque point cardinal. Le plan de l'ensemble est en forme de "Chacana" (croix andine) et la civilisation Chavin est la première chez qui on retrouve ce symbole.

Place principale

Un peu plus loin, le guide nous explique le rôle d'une pierre ornée de 7 creux qui devait représenter un félin. Si l'on a d'abord cru que ce bloc servait a accueillir des offrandes et à faire des sacrifices, on pense aujourd'hui que cela servait de repère pour l'astronomie. 

Nous rejoignons ensuite l'entrée du temple formée de deux colonnes richement décorées. L'escalier qui y mène est divisé en deux : à gauche, des pierres blanches et 7 blocs clairs à gauche de la colonne; à droite, la même chose en sombre. On retrouve ici la dualité femme (blanc)/homme (noir) que l'on rencontre ensuite dans chaque civilisation andine.

Le mur du temple est impressionnant, il mesure 14 mètres de haut et a été construit en plusieurs étapes. Cela se voit très nettement par la qualité de la maçonnerie, plus les blocs sont hauts, plus ils sont récents et plus ils ont été finement taillés. Pour amener ces lourdes pierres au sommet de l'édifice, ils construisaient des rampes d'accès le long du mur à monter (de la même façon que celles utilisées par les Égyptiens pour les pyramides). 

Une autre place se trouve un peu plus loin, ronde celle-ci. Elle était consacrée aux cérémonies réservées aux élites. Tout autour, de grandes stèles sculptées décoraient le cercle. 

Ensuite, nous entrons dans les sous-terrains situés sous le temple. Quelques marches plus loin, un étroit couloir mène au monument le plus célèbre de la culture Chavin : le Lanzon.

Ce monolithe a été taillé dans un bloc de granit rose, il mesure 4,5 mètres de haut, pèse 13 tonnes et est entièrement sculpté. C'est l'une des rares pierres de ce genre encore à sa place originale, mais étant au coeur de la structure du temple, personne n'a pu s'en emparer. On ne distingue qu'une face et que le haut de la structure mais c'est impressionnant !

Les motifs sculptés représentent un dieu avec des cheveux et un ceinturon formés de serpents, des yeux globuleux d'oiseaux et une large bouche souriante (et un peu inquiétante) ornée de crocs de félins. On retrouve la trilogie oiseau (ciel), félin (terre) et serpent (sous-sol) qui perdurera jusque chez les Incas. Une réplique est exposée au musée permettant d'en faire le tour.

Les sous-terrains forment de nombreuses galeries et presque un labyrinthe, ils étaient ventilés et servaient à entreposer liquides (chicha) et nourriture.  

Ultime étape de la visite, nous nous arrêtons de l'autre coté du temple où se trouve la seule "cabeza clava" encore en place.

Elles étaient situées à intervalle régulier (un peu plus de 2 mètres) tout autour du temple, au-sommet du mur (13 mètres) et protégées de la pluie et du soleil par des pierres sculptées qui les surplombaient.

Leur rôle était d'impressionner les visiteurs-pèlerins et d'illustrer la suprématie mystique des Chavins, les faisant craindre et respecter par les autres peuples qui n'osaient les attaquer de peur de subir les représailles d'un dieu féroce. Sous l'effet du cactus hallucinogène San Pedro, de la chicha et de la coca, avec toutes ces têtes, ces structures immenses, ces sous-terrains et leurs sciences avancées, nul doute que les Chavin y arrivaient lors des cérémonies ! 

Bien qu'étant l'une des cultures les plus anciennes des Andes et ayant laissé peu de trace à part ce site, la civilisation chavin a influencé fortement tous les peuples qui lui ont succédé, par leur maîtrise de la construction, de l'agriculture, de l'astronomie et la richesse de leur mythologie. C'est le point de départ d'une longue et riche histoire !

Nous ressortons du site non sans avoir acheté deux petits souvenirs : une croix andine en pendentif pour Sylvain et une petite "cabeza clava" pour tous les deux ! 

Nous récupérons nos sacs et reprenons le bus afin de retourner à Huaraz pour préparer notre trek de 4 jours dans la Cordillera Blanca !

i Besos !

Album photo par ici