mercredi 30 juillet 2014

Arequipa

Nous arrivons de nuit à Arequipa, grande ville de près de 900 000 habitants. Depuis la gare routière, nous prenons un taxi qui nous amène à un hôtel que nous avions repéré mais malheureusement, celui-ci est complet. Le taxi nous trouve un autre lieu, visiblement chez une de ses connaissances.

"Arequipa" signifie "l'endroit derrière le pic" en aymara et après un repos bien mérité, nous avons le plaisir de le découvrir : le spectaculaire volcan Misti domine la ville du haut de ses 5 825 mètres. 

Vue de la chambre (en se penchant un peu...)

La ville est très occidentale, les gens ne portent pas les tenues traditionnelles mais des vêtements très occidentalisés, une grande rue piétonne est bordée de magasins parfois de luxe et on y trouve un McDo, un KFC, un Starbucks et un Burger King... on préférait le charme un peu moins gringo de Sucre par exemple.
Nous consacrons la matinée à nous balader dans cette agréable ville qui compte de jolis bâtiments coloniaux et une superbe place des armes ornée de colonnades ressemblant à celles de Cuzco.




Pour déjeuner, nous choisissons une adresse réputée pour ses ceviches. Ce plat typique est composé de dés de poisson cru ou de fruits de mer marinés dans du jus de citron avec de la coriandre et plus ou moins de piment. C'est absolument délicieux !

En début d'après-midi, nous nous rendons au Museo Santuarios Andinos. C'est dans ce musée qu'est exposé "Juanita, la jeune fille des glaces". Un petit film de 20 minutes à l'entrée du musée nous explique son histoire. C'est lors d'une expédition en 1992 sur le volcan Nevado Ampato (6 310 m) que des fragments de bois évoquant des sites funéraires ont été trouvés. En 1995, suite à l'éruption du proche volcan Sabancaya, une expédition fut organisée sur le Nevado Ampato afin de retrouver le site jusqu'à présent sous la glace et mis à jour grâce au réchauffement du à l'éruption. Sur le site, des statuettes et des offrandes ont été retrouvées mais le monument funéraire s'était écroulé. C'est à l'intérieur du cratère du volcan que les archéologues découvrirent le corps d'une jeune de fille âgée de 12 à 14 ans enveloppé dans ses habits funéraires. Grâce aux conditions climatiques extrêmes, le corps a été parfaitement conservé par la glace pendant 500 ans, sauf une petite partie du visage qui a été brûlée par le soleil suite à l'éruption.

Les Incas considéraient les montagnes et les volcans comme des dieux. Il fallait donc leur faire régulièrement des offrandes pour éviter leur colère, des sacrifices d'enfants étaient donc assez régulièrement organisés. Une vingtaine de corps sacrifiés furent découverts sur les sommets andins dans les années 50.
Le corps de Juanita fut descendu du sommet et étudié à Arequipa puis aux États-Unis. Le sacrifice ne fait aucun doute, la mort serait due à un coup sur la tempe droite, mais la jeune femme n'a pas souffert sous les effets conjugués du froid, de la coca et de la chicha (alcool de mais fermenté). Son crane a subit les déformations rituelles réservées à la classe dirigeante inca. Du fait de son sacrifice, Juanita est elle-même considérée comme une divinité. Elle connaissait le sort qui l'attendait, mais cela constituait un moyen de se rapprocher des dieux incas et donc un très grand privilège d'être l'élue.

Les pièces du musée sont très belles et voir un corps congelé en presque parfait état de conservation est impressionnant. Afin de le protégé, le corps est gardé sous une cloche à très basse température et dans une pièce aux lumières très tamisées.
Cependant, la guide a été très rapide dans ses explications et nous avons un peu eu le sentiment que le but était de faire passer le plus de monde possible en une journée... dommage.

Après une agréable sieste, nous sortons pour visiter le monastère de Santa Catalina des soeurs carmélites. Deux soirs par semaine, il est ouvert au public jusqu'à 21h et éclairé seulement par des lanternes et des bougies. L'expérience est saisissante ! 



Le monastère est immense (20 000 m²) et forme une véritable "ville dans la ville". Fondé en 1580 par une riche veuve, il n'est ouvert au public que depuis 1970. Le monastère est constitué de 3 grands patios (dont le patio des novices et des orangers), chacun est entouré d'arches et richement agrémenté de plantes et de fleurs. De ces cloîtres partent des rues aux noms de villes espagnoles (Cordoba, Toledo, Burgos...). 


Tous les murs des ruelles sont peints en blanc, en rouge ou en bleu. De chaque coté, des cellules des nonnes sont ouvertes et nous pouvons les explorer. Plus ou moins grandes en fonction de la richesse de la famille de la nonne (qui payait une dote annuelle), elles sont presque toutes sur le même plan avec un lieu pour méditer, un lit et une pièce ouverte avec un four pour la cuisine.


Chaque four à bois a été allumé et l'éclairage à la bougie rend le tout très authentique dans cette ambiance feutrée. Nous sommes quasiment tout seuls et n'avons pas l'impression d'être dans un musée mais plutôt, qu'a tout moment, une religieuse va surgir et nous demander ce que nous faisons là.
Un peu plus loin se trouve le lavoir. Dans une ruelle en pente, de grandes jarres coupées en deux servent de bacs à linge et un ingénieux système permet d'apporter l'eau à chacune d'entre-elle.


Nous continuons notre chemin et découvrons une place avec une grande fontaine.


Nous entrons ensuite dans la cuisine commune, en face de laquelle se trouve le réfectoire. Tous les ustensiles sont encore à leur place, les fours sont allumés et un puit permet l'approvisionnement en eau.





Nous n'avons pas vu passer les deux heures de visite dans ce lieu unique et magique, coupé du temps et de l'agitation de la ville. Pour un peu, nous serions rentrés dans les ordres... mais rassurez-vous, nous avons réussi à résister à la tentation !

Le lendemain matin, direction la gare routière pour prendre un bus direction Cabanaconde pour explorer le canon del Colca. Les six heures de trajet passent vite sur cette route magnifique et variée où nous longeons de nombreux volcans bordés par la Puna aride puis, sur plusieurs kilomètres, des terrasses agricoles se succèdent et enfin, nous devinons le canyon en contrebas. Il est réputé comme le deuxième canyon le plus profond au monde (jusqu'à 3 000 m) après son voisin de Cotahuisi même s'il y a controverse. En tout cas, c'est vraiment vertigineux !





Une fois descendus du bus, nous prenons un petit encas sur la place centrale du sympathique village et demandons si l'auberge que nous avons réservé la veille est loin. Le serveur nous informe qu'elle se situe à 5h de marche... aie, elle est en fait située au fond du canyon et il faut ensuite encore longer le rio durant 3h... il est 14h donc, c'est râpé.


Jour de mariage à Cabanaconde

Un peu déçus, nous pensons quand même descendre dormir en bas du canyon dans le lieu surnommé "l'oasis" lorsque Sylvain s'aperçoit qu'il a oublié sa micro-doudoune dans le bus alors que ce dernier est déjà reparti pour Arequipa...aie, aie, aie. Nous allons voir la personne de l'agence qui nous envoie balader en nous disant qu'elle n'a pas le numéro de l'agence à Arequipa (mouais...) et que de toute façon, si quelqu'un la trouve il la prendra pour lui... sympa, merci pour cette aide précieuse !

En désespoir de cause, nous en discutons avec le cuistot de notre restaurant qui nous dit que ça femme est dans le bus vers Arequipa. Il la contacte mais celle-ci, après quelques recherches et coupures de réseau, nous dit que la veste n'est plus dans le bus.  Quinze minutes plus tard, elle rappelle pour nous dire que finalement, elle l'a retrouvée !!! OUF !!! Elle va la donner à un de ses amis qui arrive avec le bus du soir. La gentillesse des gens (à quelques rares exceptions près...) est assez incroyable. Du coup, nous décidons de passer la nuit à Cabanaconde et nous récupérons la veste en début de soirée histoire que Sylvain puisse manger au chaud !

Le lendemain matin, nous partons marcher vers la Cruz del Condor, le lieu le plus impressionnant du canyon et où, comme son nom l'indique, de nombreux condors se laissent planer au-dessus du vide. Nous arrivons un peu tard pour voir ces immenses oiseaux mais nous en croiserons quelques-uns en chemin dont l'un qui passe tout près de nos têtes, nous l'entendons même planer et nous voyons bien comment il se sert de sa queue comme d'un gouvernail !

La vue depuis la Cruz del Condor sur le canyon donne le vertige et nous y attendons notre bus pour rentrer sur Arequipa.



Après 6h sur la même magnifique route qu'à l'aller, nous retrouvons nos affaires à l'hôtel. Le temps d'engloutir goulûment un succulent ceviche et nous montons dans le bus pour Nazca afin de pouvoir survoler les mythiques géoglyphes.

A suivre...

Album photo par ici

mardi 29 juillet 2014

Puno et le Lac Titicaca

Après près de 9h de trajet, nous arrivons enfin à Puno, notre bus qui devait être direct et mettre seulement 6h s'est transformé en omnibus, ce qui a le dont de beaucoup faire râler notre voisin péruvien.
Le lendemain matin, nous nous levons très tôt afin de trouver un bateau qui nous mènera aux Uros, îles flottantes faites de roseau, puis à Amantani où nous souhaitons passer la nuit, avant de retourner sur le continent après une escale sur l'île de Taquile.

Par chance, un bateau part une demi-heure plus tard, le temps de faire quelques petites courses pour la famille qui nous accueillera à Amantani et de faire une balade sur la jetée.
Beaucoup de français se trouvent à bord et nous ferons notamment la connaissance de Brigitte et Jean-Yves, un couple fort sympathique d'Issy-les-Moulineaux, qui sera hébergé dans la même famille que nous, chez Blanca et ses 5 enfants.

Nous faisons le premier arrêt sur l'une des îles Uros, qui comme nous l'avions lu et entendu prend plutôt des airs de cirque à touristes. Gens déguisés en costume traditionnel avec maillot de foot en dessous, jeunes habillés en jogging et casquette Nike, mais qui essaient de ne pas trop se montrer. La rumeur dit que ces gens vivent en réalité sur le continent et ne sont là que la journée pour les touristes.
En revanche, ce qui intéressant, et ce qui nous a fait venir, c'est de comprendre comment ils bâtissent ses îles, et comment elles flottent, et bien sur de pouvoir marcher dessus. Nous avons donc le droit à une démonstration version maquette assez bien faite.
D'abord, ils doivent découper des blocs de racines de roseaux avec leur terre de 2 m de hauteur et d'environ 1m². Puis les blocs sont fixés les uns aux autres, à l'aide de pieux et de cordes, afin de constituer la base de l'île. L'île sur laquelle nous étions était composée de 8 blocs. Ceux-ci sont ensuite recouverts de roseaux coupés en prenant soin de bien croiser chaque épaisseur, jusqu'à atteindre une épaisseur de 1,5 m. Pour les maisons, en forme de petites huttes, ils rajoutent une autre épaisseur de roseaux. Les couches inférieures pourrissent petit à petit et les îliens rajoutent des roseaux frais au fur-et-à-mesure pour maintenir la flottabilité de l'île. L'île est amarrée à de grands pieux plantés autour d'elle.
C'est assez surprenant de fouler ces îles, le sol est assez meuble et on semble rebondir sur les roseaux. Et rien que pour ça, ça valait la peine de s'y arrêter.
Cela prend presque une année pour "fabriquer" une île.

Les Uros



Nous reprenons notre navigation jusqu'à notre destination, l'île d'Amantani où nous sommes logés chez l'habitant.
C'est Blanca qui nous accueille, ainsi que Cindy sa fille de 4 ans. Pendant que Blanca prépare le déjeuner, nous avons le droit à une partie de dînette avec Cindy et son poupon. ;-) Elle est super mignonne avec sa bouille ronde et ses grosses joues un peu brûlées par le soleil. En revanche dans les Andes, les gens se protègent beaucoup la tête du soleil, c'est pourquoi la petite Cindy a son bonnet péruvien vissé sur la tête du matin au soir (dans les grandes villes certains utilisent même de la crème solaire sur le visage).

Blanca en tenue traditionnelle
Cindy et son petit poussin

Blanca nous a préparé une délicieuse soupe de quinoa, suivie d'une sacrée plâtrée de patates servies avec une tranche de fromage frit. Ici, la viande se fait rare et constitue un vrai repas de fête. Blanca élève quelques poulets, mais avec 6 bouches à nourrir au quotidien, on comprend bien qu'elle ne va pas sacrifier un poulet à chaque passage de touriste.
Après ce copieux déjeuner, nous grimpons avec Brigitte et Jean-Yves jusqu'au site de Pachamama, qui offre une très jolie vue à 360° sur le lac. Il s'agit d'un site sacré pour les habitants. De forme circulaire, un petit autel se dresse à l'intérieur.
Nous continuons notre balade et montons jusqu'au site de Pachatata, de forme carré lui.
Nous redescendons de l'autre coté de l'île et rentrons au soleil couchant. Nous apercevons au loin le coté bolivien avec l'Isla de Sol et la majestueuse Cordillera real.

Temple de Pachatata et Cordillera real en fond


Cindy nous attendait avec impatience, oubliées les larmes de n'avoir pu monter avec nous.
Nous rejoignons Blanca à la cuisine. Elle prépare le dîner sur le four traditionnel, fait de terre cuite avec 2 emplacements servant de réchauds. A la base, celui-ci est creux afin de pouvoir y faire du feu et l'alimenter en combustible au fur-et-mesure. Pendant ce temps-là, 2 de ses enfants font leurs devoirs, malgré les pitreries de la petite Cindy pour les déconcentrer.

Blanca qui prépare le diner

Nous avons encore le droit à une délicieuse soupe, suivie de riz accompagné de carottes, de dés de fromage et de pommes de terre. Le tout est arrosé par le vin rouge acheté par Brigitte et Jean-Yves, que Blanca accepte également volontiers. Le vin aussi est un produit de fête et nous sommes contents de pouvoir le partager avec elle.
Nous discutons avec sa fille aînée de 13 ans et nous apprenons qu'elle a plus d'une heure de marche pour aller au collège chaque jour, sachant que ses cours démarrent à 7h45.
Après une bonne nuit de sommeil et un petit déjeuner composé de pancakes, nous rejoignons le port avec Blanca et la petit Cindy qui tenait à nous accompagner. Sylvain lui a trouvé des feutres qu'elle tient comme un trésor des étoiles plein les yeux et là, ça n'en finit plus avec les câlins. :-)
Sur le quai, nous attend le bateau qui doit nous mener sur l'île de Taquile avant de rentrer à Puno. 

Déjà le temps des "au revoir"


Après 1h de navigation, nous arrivons à Taquile, l'île la plus connue et donc la plus touristique coté péruvien. 

Taquile



Là, nous attend un guide, Jésus (si, si) qui nous accompagne tout le long de l'ascension jusqu'à la place principale. Sur le chemin, nous croisons beaucoup de personnes en habit traditionnel, mais pas seulement pour le folklore. Jésus nous explique que ces vêtements ont une véritable signification. 

Tenue traditionnelle
Les hommes mariés portent un long bonnet rouge à bandes bleues foncées. Pour les hommes célibataires, celui-ci est blanc à la base, puis rouge au-dessus. La façon de porter le bonnet a aussi son importance, plié d'une certaine façon pour les célibataires, il signifie "oui, mais j'ai une petite-copine". 

Bonnet traditionnel d'homme marié
Les hommes ayant des fonctions politiques portent un autre bonnet beaucoup plus court et coloré, qui ressemble dans la forme au bonnet péruvien. Ils ont l'autorisation de le porter durant 1 an après leur mandat.

Bonnet pour les hommes aux fonctions politiques
Les hommes portent également une ceinture qui symbolisait un calendrier et donc avec 12 motifs représentant chacun un mois, aujourd'hui ils se laissent aller à des motifs plus libres.

Les femmes quant à elles portent une longue et large étole noire bordée de pompons. Pour les femmes célibataires, les pompons sont très gros et avec des couleurs claires. Pour les femmes mariées, ils sont petits avec des couleurs sombres.




Le guide nous explique également qu'il n'y a pas de chien sur l'île, car ceux-ci sont utilisés uniquement pour garder les maisons. Comme il n'y a pas de voleurs sur l'île, les chiens sont interdits. Les gens sont dissuadés de voler car ils ont trop peur d'être dénoncés au confessionnal de l'église et qu'on leur jette un sort risquant de les rendre malade ou de les tuer. 




Nous reprenons la route d'un autre port afin de rentrer vers Puno, où nous arrivons après 3h de navigation.
Le temps de récupérer nos gros sacs (nous les laissons dans les hôtels dès lors que nous partons vadrouiller pour 2-3 jours) et nous reprenons un bus direction Arequipa.

Fin de nos aventures sur le plus haut lac navigable au monde !
A très vite !

samedi 26 juillet 2014

Cuzco et la Vallée sacrée

De retour à Cuzco, nous visitons le très chouette musée de l'Inca. Un guide nous accompagne et nous explique très clairement et de façon passionnante les différentes salles. Celles-ci retracent l'histoire du Pérou de la préhistoire à la conquête espagnole. Nous avons particulièrement aimé les collections de céramiques, les petits lamas modelés en argent servant d'offrande et la série d'une quarantaine de petites statuettes très finement sculptées en turquoise. Comme souvent, les photos sont interdites. Au rez-de-chaussée, des femmes vendent leur artisanat : tissus, céramiques, bijoux... Nous craquons à nouveau pour un joli vase et deux petites céramiques dont une terminée devant nous !

La dame qui finit l'une de nos céramiques

Le lendemain matin, nous prenons un collectivo (bus) en direction de Pisac et nous descendons en route au site inca de Tambomachay. Dans toute la région se succèdent d'innombrables ruines incas, nous choisissons de privilégier celles qui sont les plus intéressantes et qui sont comprises dans notre billet touristique acheté le matin même à Cuzco. 

Il ne reste plus grand chose à Tambomachay à part une très belle fontaine à trois niveaux, encore fonctionnelle et surplombant des bains. L'Inca serait venu se tremper ici.

Fontaine de Tambomachay


De l'autre côté de la route se trouve la forteresse de Pukapukara qui était un poste de garde mais aussi un pavillon de chasse et une étape pour les voyageurs. Il reste quelques habitations au pied des remparts. Si le site n'est pas extraordinaire, la vue panoramique est très chouette.

Pukapukara


Nous redescendons la route à pied vers Cuzco et visitons notre troisième site du jour, le plus impressionnant : Sacsayhuaman. Les ruines sont immenses et pourtant, il n'en reste que 20 %. Important sur le plan religieux, ce fut également une remarquable forteresse que Manco Inca repris aux mains de Juan Pizarro en 1536. La victoire fut de courte durée et les espagnols revinrent plus nombreux et reprirent la citadelle au prix de milliers de morts.

Sacsayhuaman
Il faut imaginer que le petit fil nous arrive aux genoux et que nous arrivons à peine à la moitié du "menhir" devant nous (désolée déformation bretonne et astérixienne ;-)



La plupart des murs ont été démontés par les conquistadores pour construire leurs maisons, seuls les plus grands blocs sont restés en place et certains dépassent les 300 tonnes... Le neuvième Inca Pachacutec, grand bâtisseur, a conçut le plan de Cuzco en forme de puma, Sacsayhuaman surplombe la ville et représente la tête de l'animal. Les 22 murs en zig-zags, qui forment les imposants remparts sur trois hauteurs, sont les dents du félin. Trois tours gardaient le fort, il ne reste que les fondations de l'une d'entre elles mais qui laisse imaginer l'immensité de l'édifice.

Sacsayhuaman - "les dents" du puma

Le site compte également de nombreuses habitations qui abritaient quelques 5 000 guerriers d'élites de l'Inca. 

Dernier site de cette journée bien remplie, Q'enqo qui est un ensemble de tunnels, de canaux et d'escaliers creusés dans un immense bloc de calcaire. De nombreux autels ont été sculptés et le lieu servait essentiellement pour les sacrifices rituels.

Après une nuit de repos bien méritée, nous reprenons le même collectivo que la veille mais allons cette fois jusqu'à la petite ville de Pisac qui se trouve dans la vallée sacrée des Incas (vallée de la rivière Urubamba). Au-dessus de la ville actuelle se tient l'imposante cité inca bâtie en forme de condor. La citadelle est nichée à la confluence de trois gorges abruptes, endroit stratégique car gardant l'entrée de la vallée ainsi qu'un col menant à la selva. Le vaste site est composé de trois parties : la première est le centre cérémoniel qui surplombe de grandes terrasses agricoles ; la seconde joua un rôle militaire et la troisième abritait de nombreuses habitations à la construction plus sommaire. 
Cité "militaire"
Terrasses agricoles
Zone d'habitation
La partie la plus impressionnante est celle des temples. De nombreux canaux et fontaines sont encore en état de fonctionnement et l'architecture de certains bâtiments est époustouflante. Chaque pierre est taillée au millimètre pour joindre de façon parfaite avec ses voisines, c'est un travail absolument remarquable ! La forme trapézoïdale des portes et des fenêtres permettaient à l'édifice de résister aux tremblements de terre fréquent dans la région.

Zones des temples
Fontaine et canalisations

Après plusieurs heures de promenade sur le site, nous redescendons en ville à pied. Dans le lieu où nous achetons nos empanadas pour le déjeuner se trouve un hôtel à cuys (cochons d'Inde), ils ont l'air de s'y plaire, inconscients du triste sort qui les attend... 

La cabane des cuys (à droite le four) ;-(

Nous remontons ensuite un peu plus la Vallée sacrée, passons la ville peu intéressante d'Urubamba et arrivons à Ollantaytambo où nous passons la nuit. La pension est charmante et la tenancière nous fait fortement penser à La Dona de la série Treme en version latino (pour ceux qui ne connaissent pas, on vous la recommande chaudement !), autant physiquement (visage dur) qu'au niveau de son caractère bien trempé mais qui connaît également très bien la région. Trois chats se prélassent dans l'auberge, ils sont vraiment les rois et s'installent sur nos genoux dès que nous nous asseyons. 

Au petit matin, nous arrivons sur le site inca d'Ollantaytambo pour l'ouverture à 7h. Nous visitons le site en compagnie de quatre français forts sympathiques que nous avons rencontré la veille et que nous saluons chaleureusement ! Le site est moins vaste que Pisac mais il n'en est pas moins passionnant, d'autant plus que nous prenons un guide qui nous permettra de mieux comprendre ce lieu bâti en forme de lama.


Ollantaytambo


En bas se trouve "l'hôpital" où des fontaines d'eau sacrée servaient à soigner les malades, accompagnée de tout le savoir des Incas sur les plantes médicinales. Il y a également une curieuse pierre grise qui compte trois rigoles, notre guide nous explique que les femmes accouchaient en haut de la pierre et qu'en fonction du canal dans lequel glissait le placenta, on attribuait à l'enfant un élément (terre, eau, air, feu...) et cela conditionnait son futur métier et une place bien définie dans la société. Sur le site se trouvait également une école et les enfants étaient répartis dans les classes en fonction de leur élément.

Partie de l'hopital
Fontaine d'eau sacrée et médicinale
Pierre où les femmes accouchaient et ses 3 toboggans du destin

En se retournant, une montagne sacrée domine le village. On peut y apercevoir (avec un peu d'imagination quand même !) un homme de profil, sa femme et son fils dans un drap accroché à son dos. Cette montagne servait également de calendrier car les marches qu'elle dessine permettait aux astronomes Incas de déterminer le mois de l'année en fonction de la position du soleil. C'était une donnée fondamentale pour l'agriculture. 

Montagne "calendrier" - avec l'Inca allongé de profil (à droite), sa femme et son bébé sur le dos (on vous montrera en rentrant :-)
Nous grimpons ensuite le long de nombreuses terrasses de culture. Au-dessus se trouvent les temples ainsi que les bâtiments défensifs. Un chemin de ronde servait pour protéger le site qui était surplombé par une colossale tour de garde dont il ne reste que les fondations titanesques et quelques énormes blocs qui se sont écroulés. Les pierres  les plus grosses proviennent d'une carrière de l'autre côté de la vallée, à près de 7 kilomètres. Il fallait donc d'abord extraire les blocs, puis les descendre dans la vallée, les faire "traverser" la rivière dont les Incas détournaient le cours pour passer les blocs d'un côté à l'autre. Ils ne leur restaient "plus qu'à" les monter jusqu'au sommet de la forteresse, près de 200 mètres au dessus de la vallée. Pour déplacer ces pierres, ils les faisaient rouler sur des rondins de bois et des pierres arrondies, certains poussaient et d'autres tiraient à l'aide de cordes.

Entaille dans la pierre réalisée avec un fil contenant du fer

La tour servait également à communiquer par un jeu de miroir en argent, des messages pouvaient être transmis quasi instantanément d'un bout à l'autre de la vallée, soit de Pisac jusqu'au Machu Picchu. L'ingéniosité des Incas était vraiment remarquable.

Zone des temples - base de ce qu'il reste de la tour

Certaines allées sont bordées de nombreuses petites niches, chacune représente une divinité qu'il convient d'honorer en fonction de sa fonction sociale : un paysan va honorer la terre (Pachamama), un astronome les étoiles, un guerrier le feu...


Niches pour les offrandes aux divinités

Après un bon petit déjeuner à l'auberge, nous prenons un taxi pour accéder à trois nouveaux sites et ensuite redescendre sur Cuzco. 

Le premier de ces sites est Moray. Ici, les terrasses de culture forment des cercles concentriques très réguliers. Les Incas ne voulant pas modifier le relief naturel ont simplement composés avec. Ce lieu servait de laboratoire agricole. En effet, en fonction de la position de la terrasse, le climat n'était pas le même. Les premiers cercles recevaient davantage d'humidité et de chaleur, il permettait de faire pousser les essences de la selva. Un peu plus haut, le microclimat était plus proche de celui de la côte et, tout en haut, on retrouve le climat de la puna (montagne), plus sec et plus froid. Ainsi, les Incas pouvaient sélectionner les espèces les mieux adaptées à chaque région. Trois ensembles circulaires se succèdent, le premier est le plus grand et le mieux conservé. Il n'y a pas d'escalier pour descendre dans les cercles, seulement des pierres qui sortent des murs des terrasses afin de ne pas fragiliser ces dernières.

Moray
Moray - escalier des terrasses


Le second site se nomme Salinas. A flanc de montagne se trouvent d'innombrables bassins qui sont en fait des marais salants. Une petite source d'eau chaude et très salée (plus que la mer) sort de la montage avec un débit toujours constant, quelque soit la pluviométrie. Ce cours d'eau quasi-miraculeux est ensuite acheminé vers les bassins à l'aide de nombreux canaux, le soleil permet ensuite l'évaporation de l'eau et les travailleurs récoltent ensuite le sel de la même façon que le faisait les Incas plus de 500 ans avant eux. Le sel récolté ici sert à la consommation et est vendu chaque dimanche sur le marché d'Urubamba. Les nombreux bassins et les différences de couleurs entre chacun d'eux offrent un spectacle superbe et très surprenant.


Salinas - hommes travaillant le sel


Le troisième site est Chinchero et c'est sûrement le moins impressionnant des trois. Cependant, les grands remparts surplombant la vallée et les montagnes environantes méritent amplement l'arrêt. En redescendant du site, nous faisons un petit tour au marché avec notre chauffeur. Nous en profitons pour goûter la fameuse chicha, alcool de maïs fermenté local. Après avoir trinqué avec quelques anciens du village, nous goûtons la version "soft" du breuvage qui n'est pas mauvais du tout ! On dirait un peu du jus de raisin alcoolisé qui mousse et ce n'est pas trop fort (moins de 10°). 

Chinchero - place de l'église

Marché de Chinchero

Après ce petit apéro improvisé, nous reprenons la route jusqu'à Cuzco où nous passons notre dernière nuit. Le lendemain, un bus nous emmène à Puno, sur la rive péruvienne du lac Titicaca. 


Si le Machu Picchu est évidemment le site le plus connu et le plus majestueux, la Vallée sacrée et ses alentours regorgent de sites tous très différents les uns des autres. Chacun témoigne à sa manière du savoir-faire et de l'intelligence des Incas et de tous les peuples qui les ont précédés et dont ils se sont inspirés. Nous avons finalement passé près de 10 jours autour de Cuzco mais cela en valait vraiment le coup ! Comme nous n'avons pas effectué de long trajet en bus ces derniers temps, cela explique un peu notre retard car c'est bien pratique, le bus, pour écrire nos articles ! 


A bientôt pour de nouvelles aventures lacustres !

Album photo par ici